Voici 80 ans : le bombardement de l’usine

Avro Lancaster Mark III, les bombardiers de nuit de la Royal Air Force

Autre anniversaire ce mois-ci, certes moins gai mais très historique. Voici 80 ans dans la nuit du 10 au 11 mars 1944, l’usine, qui se composait alors du bâtiment 1 (aujourd’hui l’usine métallique) et du bâtiment 2 (le bâtiment composites de l’entrée) était bombardée par la Royal Air Force.  Le site passé alors sous le contrôle de la société allemande ERLA travaillait à remettre en état de vol des chasseurs MS 406 et Dewoitine 520, pour la Luftwaffe et ses alliés, et commençait à réparer des chasseurs Focke-Wulf 190. Et l’aérodrome accueillait une escadrille de chasse la JG 101 dont la fonction était surtout de perfectionner sur avions de combat des jeunes pilotes sortant d’écoles de pilotage. En prévision du futur débarquement le commandement allié avait donc décidé d’un plan de frappes stratégiques en France et en Allemagne pour réduire le potentiel militaire nazi. C’est l’opération Minnow. 23 quadrimoteurs Avro Lancaster Mark III des Squadrons 44 et 49  basés dans le nord de l’Angleterre atteignent Tarbes vers 23 h après plus de 4 h de vol.  A 23 h 35 les bombardiers commencent à marquer la cible, sans que l’alerte ait été donnée et les premières bombes tombent un peu avant minuit. Le projecteur de la défense anti-aérienne est détruit dans les premiers temps de l’attaque. Aveuglées les batteries anti-aériennes ne peuvent pas grand chose.  Pendant 30 minutes, les explosions se succèdent. Près de 1 000 bombes, dont les 800 bombes incendiaires sont déversées en neuf vagues successives, larguées depuis une altitude comprise entre 6 000 et 8 000 pieds.

Messerschmitt 109E de l’escadrille JG 101 alors basée à Pau mais avec un détachement permanent sur la piste d’Ossun, identifiée Pau-Ost par la Luftwaffe. Non équipés pour le vol de nuit, non alertés, aucun n’a décollé. Beaucoup de leurs appareils ont été détruits lors du raid. (remerciements à Gilles Collaveri – association Aerocherche Accueil (aerocherche.fr)
Quelques images de l’album photos d’un pilote de la JG 101, Karl Georg Gerth, qui semble montrer une ambiance plutôt détendue… (courtoisie Gilles Collaveri, Aerocherche).

La population locale, jusque là épargnée par la guerre, est évidemment très choquée et durablement. Le directeur de l’usine, Georges Caillette, parmi les premiers accourus sur les lieux dresse rapidement le bilan pour les autorités : près de 10 000 m2 de l’usine sur 18 000 sont impactés, de nombreux incendies et cratères dans un rayon de 2 km autour du site.  Et beaucoup de bombes n’ont pas explosé… Le personnel de l’usine compte deux blessés et une habitante voisine de l’usine est morte dans l’effondrement de sa maison tandis que sa voisine était blessée, Du côté des troupes allemandes le bilan est plus lourd mais non dévoilé, idem pour les dégâts concernant la Luftwaffe.  Si pour les équipages de la RAF, tous rentrés sains et sauf, paraît un succès, seuls 10 coups au but ont été enregistrés n’endommageant les installations que pour un temps. On sait que de nombreux avions sont détruits dont le Caudron Simoun du pilote d’essais Marcel Doret, qui était stocké dans un hangar, mais beaucoup d’avions seront réparables. Le résultat mitigé du raid permettra à la Résistance d’obtenir que la RAF ne revienne pas bombarder les usines de Tarbes comme l’arsenal et l’usine Hispano-Suiza (aujourd’hui Alstom) au profit de sabotages beaucoup plus efficaces. Et l’usine put se remettre au service de la France, dès la libération de Tarbes le 20 août 1944. De cet épisode, il ne reste que la prudence lors de chantiers sur le site d’Ossun-Louey au cas où des bombes non éclatées de 1944 auraient le mauvais goût de remonter à la surface… Pour ceux qui veulent en savoir plus, il faut lire l’excellent mémoire de la conférence donnée par Jean Rousse et Lucien Bottari, deux de nos éminents membres, en 1984 à la société académique des Hautes Pyrénées lisible sur le site de la BNF https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6535053x/f52.item

Le hall du bâtiment 1 après le bombardement. Les dégâts seront assez vite réparés et permettront la remise en état de Dewoitine 520 pour équiper le groupe de chasse des Forces Françaises de l’Intérieur formé à la Libération fin août 1944. Et de commencer l’assemblage du MS 470 alors caché démonté dans le Garage de la grotte à Lourdes.

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