
Après être parti combattre sur Dewoitine 520 au sein du groupe ‘Doret’ en septembre 1944, le capitaine Jean Cliquet, est retourné à l’usine Morane-Saulnier fin 1944. Sa nouvelle mission ? Faire voler le premier avion français nouveau depuis la libération.
En effet, depuis la libération de l’usine le 19 août 1944, les travaux ont repris sur le prototype du MS 470, avion d’entraînement à la chasse. et après des mois de travaux menés avec les difficultés d’approvisionnement de la fin de la guerre en Europe, d’un manque de personnel, il s’agit d’un véritable tour de force. Les informations sont un peu confuses, des sources mentionnent un premier vol le 22 décembre 1944, d’autres le 6 février 1945. Pour notre part nous avons retenu la date officielle du 22 février 1945, au moment où le ministère de l’Air annonce une commande 1 000 appareils, qui sera d’ailleurs réduite à la fin du conflit. Jean Cliquet a effectué quelques prudents sauts de puce avant de s’envoler pour de bon ce 22 février. A cette occasion l’avion reçoit un nom de baptême, « Vanneau » : une première chez l’avionneur, poursuivie chez SOCATA jusqu’au TBM…
Le programme avait été lancé semi-officiellement en juillet 1941 par le général Bergeret, alors secrétaire d’état de l’Air du gouvernement de Vichy, qui prévoyait de rééquiper l’armée de l’Air, dans le cadre d’un vaste plan en dérogation des accords d’Armistice. La contrepartie ? Il pouvait commander de nouveaux avions à condition d’en fournir le double à la Luftwaffe et ses alliés… Il espérait ainsi relancer l’industrie aéronautique française en ne fournissant que des avions de transport et d’entraînement à l’occupant. En attendant, dans ce contexte difficile où les travail est rare, c’est une façon d’assurer du travail à l’équipe repliée à Tarbes depuis le Printemps 1941 autour de René Gauthier. Le MS 470 s’inscrit pour la mission dans la lignée des prototypes d’avions d’entraînement MS 430 puis 435, dérivés avant-guerre du MS 406, destinés à familiariser les pilotes de chasse au maniement des avions modernes. En revanche le dessin général de l’avion a bénéficié de la conception MS 460 qui répondait au programme de chasseur de septembre 1939 : avion entièrement métallique autour d’un moteur Hispano-Suiza 12Z de 1300 ch, voilure trapézoïdale à profil très mince. Par conséquent un dispositif à la Curtiss P-40 est adopté, avec une rotation des roues pour rentrer le train vers l’arrière. Le moteur prévu est un Hispano-Suiza 12X de 690 ch.
La maquette du MS 470 est testée à la soufflerie de Toulouse-Banlève au printemps 1942 tandis que la cellule du prototype commence à être assemblée dans les ateliers d’Ossun-Louey. Comme les approvisionnements restent limités, peut-être certains éléments proviennent-ils du prototype du MS 460, mais rien n’est sûr. En Novembre 1942 la zone libre est envahie à son tour par les troupes allemandes à la suite du débarquement allié en Afrique du Nord. Georges Caillette, Morane-Saulnier ont tout juste le temps de faire démonter le prototype et de le mettre à l’abri dans un garage de Lourdes jusqu’au départ des Allemands le 19 août 1944.
Charles Tillon, chef des FTP promu ministre de l’Air en septembre 1944, y voit un symbole du redémarrage de l’industrie aéronautique française et en fait une priorité du moment. Il salue dans un discours ce premier vol d’un avion français. Ce prototype 01 va effectuer 11 vols avant d’être arrêté le 21 août 1945 suite à une panne. Les vols qui vont révéler un certain nombre de problèmes, notamment liés au moteur peu fiable et qui n’est plus produit. Le bureau d’études se remet au travail et prépare un nouveau modèle, le MS 472 « Vanneau II » équipé du Snecma (ex-Gnome-Rhône) 14M, moteur en étoile de 570 ch réputé plus fiable et disponible en quantité. Le prototype vole le 12 décembre 1945 tandis que la commande initiale est réduite à 230 exemplaires, mais ceci est une autre histoire….

Un dessin d’époque évoquant le premier Vanneau.
